Nous nous retrouvons à nouveau aujourd’hui dans la pièce du XVIᵉ siècle de l’aile Est du Manoir de la Chevallerie.
Depuis plus d’un an, nous y menons une série de restaurations successives, patiemment, ouverture après ouverture, pierre après pierre.
Un chantier au long cours
Liens vers les différents articles de la série :
- Etat des lieux.
- Déplacement de la chaudière
- Ouverture de la porte Sud
- Préparation du sol
- Restauration de la porte Est
- Pose des pavés sur le sol
- cet article – restauration de la porte Sud
- Restauration de l’ouverture Nord
- Restauration de l’ouverture Sud
- Restauration de la cheminée
- Restauration des murs et plafonds
- détails sur l’occulus et les faux appareillages
- Fin – restitution des travaux
La cheminée du XVIᵉ siècle
Après avoir évoqué les ouvertures et le sol, vient le moment de nous intéresser à l’un des éléments majeurs de cette pièce : la cheminée.
Véritable témoin du XVIème siècle, elle conserve les marques du style et de la technique de son époque.
Pour rappel : voir l’article précédent sur la restauration des ouvertures ou l’état des lieux
Une cheminée d’époque Renaissance
Datant manifestement du milieu du XVIᵉ siècle, la cheminée arbore sur sa hotte le blason des Tiercelin, famille seigneuriale qui quitta la Chevallerie vers 1575
Les cheminées de cette période reprennent encore certains traits du XVe siècle :
- un foyer haut,
- des jambages en colonnette,
- des corbeaux en pan coupé ou en console moulurée,
- un linteau chanfreiné ou mouluré,
- et, innovation du XVIᵉ, une barre de fer placée derrière le linteau pour soutenir la hotte.
un peu de vocabulaire pour suivre le reste de l’article

Le décor sculpté
Sur la hotte, un cartouche ornementé de rinceaux de rubans et de feuilles d’acanthe entoure le blason des Tiercelin surmonté de sa couronne.
Bien que buriné à la Révolution, sans doute à l’époque de la Terreur, le motif reste lisible et d’une grande finesse.

Description architecturale
Toute la cheminée est composée de tuffeau.
Les jambages sont des colonnettes engagées, posées sur des bases moulurées en boudin.
Les corbeaux adoptent une forme de console moulurée, comparable à celle de la “chambre à la colonne”.
Le linteau, décoré d’une arête quarrée, soutient une hotte peinte de faux joints, qui recouvrent parfois les véritables joints de maçonnerie.
Enfin, la corniche supérieure présente un profil directement inspiré du classicisme antique.
État des lieux à notre arrivée
Lorsque nous avons découvert la pièce, elle servait depuis longtemps de local à chaudière et d’espace de stockage.



Les corbeaux et le linteau se sont révélés en bon état, mais le jambage droit et sa base étaient très détériorés, de même que le contre-cœur du foyer.
Diagnostic et intervention
Un diagnostic précis a été réalisé par le tailleur de pierre Alain Roguet (Pervenchères).
Son objectif : conserver le maximum de pierre saine tout en consolidant les zones fragilisées.
Un peu comme chez le dentiste, il s’agissait de greffer plutôt que remplacer.

Il a été décidé de :
- remplacer entièrement la base droite,
- greffer une nouvelle pierre sur la partie haute du jambage,
- et reconstituer le contre-cœur pour redonner cohésion à l’ensemble.

Les étapes de la restauration
Remplacement de la base




Reprise du bas du jambage



Greffe de pierre



Une fois ces opérations terminées, une remaçonnerie du contre-cœur a permis de redonner toute sa stabilité et son allure à l’ensemble


Avant / Après
Le résultat parle de lui-même :
une cheminée raffermie, équilibrée et lisible, retrouvant la noblesse de ses proportions d’origine.


Remerciements
Alain Roguet, tailleur de pierre à Pervenchères, pour son savoir-faire et la délicatesse de son intervention
remerciements à Samuel Gatouillat, sur ce chantier (et sur bien d’autres ! )
Et la suite ?
La restauration des ouvertures Sud et Nord est arrivée à son terme (sauf pour les fenêtres définitives)
Prochaine étape : la restitution complète de la pièce, murs et plafonds compris, pour redonner à cet espace son atmosphère du XVIᵉ siècle.
